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L'entretien du mois

Publié le par Coeur du Congo

L'entretien du mois

« Cœur du Congo, et je m’y opposerai toujours, se contente d’être une association apolitique. »

Après les membres du Bureau de l’Association Cœur du Congo (ACC), la commission communication s’est entretenue le 8 décembre 2013 avec monsieur Christian TCHICAYA, Vérificateur de l’association.

Quelques mois après votre prise de fonction, avez-vous déjà pris la mesure de votre poste ?

Pas tout à fait. J’ai constaté que jusqu’à présent le Vérificateur ne contrôlait le Bureau qu’à la fin du mandat. J’aimerais par contre adopter la démarche suivante : utiliser la première année pour recueillir toutes les données sur nos principales activités, et la deuxième année faire systématiquement une comparaison activité par activité afin de voir dans quel sens va évoluer nos dépenses pendant la mandature.

On semble noter comme un désintéressement des membres vis-à-vis de l’association. A votre avis, que faut-il faire pour susciter de nouveau leur intérêt ?

C’est vrai que nous faisons de bonnes choses, mais je trouve que nous nous sommes installés dans une routine. Chaque année nous refaisons les mêmes choses et l’association ne fait plus rêver. Pour moi, chaque année, en plus de nos activités habituelles le Bureau doit proposer une nouvelle activité tel qu’un exposé sur le Congo ou sur la littérature congolaise. Cela afin de mieux faire connaître notre pays et d’apporter le sang neuf nécessaire pour garder le dynamisme des membres. Car c’est au Bureau qu’il revient de faire vivre une association. Et quand on parle du Bureau, généralement, on voit le Président. Même si le Président ne fait pas directement, au moins il dit à ses collaborateurs comment fait - on pour faire vivre une idée, pour lui donner corps.

Comme vous le savez notre association ne vit que des cotisations. Faire vivre une idée génère des coûts, et l’argent pour porter une idée manque parfois au niveau de la caisse ?

Oui, c’est un peu le tort de Cœur du Congo. Cœur du Congo, et je m’y opposerai toujours, se contente d’être une association apolitique. Moi je dis que c’est une notion dépassée. On ne peut pas vouloir encadrer les enfants, on ne peut pas vouloir constituer un groupe, sachant qu’on vient tous de l’étranger, sans qu’il y ait au fond, je dis bien au fond, une idée politique. Une idée politique ce n’est pas spécialement l’idée de faire de la politique comme on l’entend, non. Une idée politique c’est avoir à la base des idées, leurs donner corps et avoir une visibilité. C’est important. Nous nous sommes cantonnés au rôle d’association apolitique et on ne fait que, comme j’ai dit tout à l’heure, ce que nous savons faire. Résultat nous ne pouvons même pas demander une subvention ; alors que si on essaie d’avoir des projets qui vont au-delà de ce qu’on fait régulièrement, et de se dire que finalement d’une manière ou d’une autre nous sommes aussi une association politique, je pense qu’on peut solliciter des subventions. On peut avoir des projets soutenus, on peut faire des journées culturelles ayant pour but de faire connaître notre pays en Alsace, c’est tout à fait possible. Si par exemple on veut faire connaître la littérature congolaise, il y a des bouquins, vraiment il y a le corpus qu’il faut pour faire un tas de trucs ! On peut faire la genèse de cette littérature à partir de la légende de M’Pfoumou ma Mazono de Jean MALONGA. On peut partir de là, parce que c’est le début de notre littérature, jusqu’aujourd’hui avec N’SONDÉ Wilfried. On ne va pas citer les auteurs inconnus, mais il y a un corpus. On peut prendre des extraits de textes, on peut mettre les images des auteurs avec une certaine biographie, leurs œuvres majeures, faire un petit commentaire, constituer un petit livret. On n’a pas d’argent pour faire la pub dans la presse, le métro ou encore 20 minutes. On peut solliciter une salle de conférence, à la Maison des Associations par exemple, et faire une exposition sur la littérature congolaise avec une entrée gratuite et quelques petits documents qu’on pourra vendre. Si on engage bien un tel projet, s’il est bien ficelé, on peut solliciter une subvention et peut être qu’elle pourrait nous être octroyée. C’est tout à fait possible. J’ai du mal à concevoir une association sans côté politique, ce n’est pas possible. A mon avis c’est une très vieille idée qui a beaucoup existé à l’époque des deux blocs. On venait en France comme étudiant et on ne voulait pas faire de la politique. Moi je dis qu’on est une association, on peut aussi avoir des positions politiques. Ne serait-ce que parce que dans ce pays on nous voit d’une certaine manière. Si on prend par exemple la question du racisme, il y a eu une Ministre de la République qui a été traitée de guenon, on ne peut pas dire que nous les africains noirs ou les congolais soyons indemnes d’une telle insulte. Ce n’est pas possible puisque d’une manière ou d’une autre on est des noirs et que cette insulte là nous concerne aussi. S’il y avait un aspect tant soit peu politique de l’association on aurait peut-être eu une réaction, laquelle je n’en sais rien. En tout cas, l’aspect politique n’est pas inopportun dans une association.

L'entretien du mois

A vous entendre, on se dirait que l’ACC doit repenser son projet associatif ?

Tout à fait, tout à fait. L’aspect politique ne peut pas être indéfiniment écarté de l’association. Ce n’est pas possible ! J’ai l’impression que dans cette association les enfants s’étouffent. Si on ne leur donne pas des soupapes pour qu’ils s’expriment, ils vont s’étouffer, ils vont considérer que Cœur du Congo ne fait que le soutien scolaire. Mais il faut qu’il y ait, au-delà du soutien scolaire, la possibilité de leur donner une initiation. C’est quoi le racisme ? C’est quoi les droits de l’homme ? Où est ce que vous pouvez-vous engager pour lutter contre le racisme ou promouvoir les droits de l’homme ? Il y a des associations qui existent pour cela, il faut aiguiller, orienter les enfants vers ces directions. Il ne faut pas qu’ils restent trop accrochés à nous. Il faut qu’à un certain moment on leur apprennent à penser, qu’on leurs parle de philosophie, qu’ils s’émancipent. S’il n’y a pas cet aspect c’est regrettable.

Étoffer les activités de l’association exige plus de créneaux d’occupation de salles et ceux-ci ne sont pas acquis d’avance. Le manque de local semble donc être un frein à l’élargissement de nos activités. Êtes-vous d’accord avec cet avis ?

C’est tout à fait vrai. Mais ce serait un tort de dire que c’est la seule réponse qui sied. Je pense qu’il y a une conséquence qui est aussi une réponse, et je viens de le dire, il manque à l’ACC cet aspect politique. Demander à tous les membres de l’ACC, et éventuellement à leurs enfants, d’acquérir la nationalité française c’est très important. C’est une vision stratégique. C’est-à-dire que, le politique ne vous accorde de l’importance que lorsqu’il sait que vous pouvez « le tenir par la barbichette », lorsqu’il sait qu’avoir vingt voix du coté de Cœur du Congo c’est déjà mieux que rien. Donc, Il faut d’abord qu’on se dote de cet aspect politique, que l’acquisition de la nationalité française soit vraiment conseillée. C’est ce qui nous donnera un certain pouvoir. C’est ce qui fera que, malgré les règles qui font que pour disposer d’une salle dans tel ou tel quartier il faut y avoir une adresse, on pourra peut-être obtenir un local dans n’importe quel quartier. C’est ce qui pourra peut-être faire que lorsque les autorités de la place constateront que dans cette association beaucoup de membres ont la nationalité française, elles pourront se dire que vingt voix de l’ACC sont importantes et cela pourrait faire la différence.

Seriez-vous prêt à faire partie d’un groupe de réflexion pour travailler sur un nouveau projet associatif ?

Tout à fait, tout à fait. De toutes les façons il n’y a que ça qui nous reste à faire. Je suis disponible et disposé.

Ce sont des aspects qui auraient pu être débattus au sein de la commission famille et vie associative, malheureusement celle-ci ne fonctionne pas encore ?

L’idée des commissions, initiée par le Secrétaire Général, n’est pas mauvaise. Mais il faut trouver les bonnes personnes pour les animer.

Vous n’avez pas voulu être à la tête d’une commission. J’avais pensé à vous comme référent de cette commission, car elle convient bien à une personne animée de bonne volonté et qui a pas mal d’idées ?

Je peux toujours revoir ma position.

L’idée des commissions, à votre avis, était une bonne chose. Mais à ce jour l’ensemble des commissions mises en place ne fonctionne pas encore, à l’exception des commissions communication et finance qui ont amorcé leur réflexion. Ne pensez-vous pas que ces commissions ne constituent que des caisses de résonnance?

Non elles ne sont pas des caisses de résonnance. Les commissions ne sont pas une mauvaise chose, c’est peut-être même une très bonne initiative du Secrétaire Général. Mais la question se pose au niveau des personnes qui animent ces commissions. Il faut une impulsion qui vienne, j’allais dire du Président, c’est important. Est-ce que le Président y croit ? Parce que quand on veut animer ou diriger une structure ou une institution, aussi petite soit-elle, je pense qu’il faut quand même avoir foi en ce que l’on veut faire. Il faut y croire et voir déjà l’aboutissement alors qu’on en est encore qu’au début. Et ce sont des gens comme ça qu’il faut avoir en tête de chaque commission. Mais on les a nommés comme ça parce qu’on voulait aller vite ; et c’est ça le problème. Si on ne croit pas en ce que l’on fait, on peut avoir vingt, trente, cinquante commissions ça ne fera rien du tout.

En dehors de l’innovation sur la dimension politique, quelles propositions faites-vous pour redynamiser l’association ?

Je vais me redire, je vais me redire puis je vais aborder une question pour laquelle on ne va pas changer ma position.

Premièrement il y a la question de l’innovation, ne pas oublier le volet politique. Deuxièmement, limiter au minimum le nombre de commissions, on en a trop constituées. Ne mettre à la tête de ces commissions que des gens volontaires, ceux qui savent qu’ils sont capables d’animer ces commissions, qui peuvent avoir des idées à proposer. Demander au Président d’avoir avec eux des retrouvailles pas forcément régulières, mais ponctuelles pour faire le point sur ce qu’il est possible de faire.

Et enfin, c’est toujours une question qui fâche, moi je pense que ce serait bien qu’on revienne sur les repas, les réunions qu’on faisait chez les membres. Je sais que c’est une question qui fâche. Mais on a décidé dans un sens à un moment, je pense qu’on peut aussi défaire la décision qu’on a prise et décider dans l’autre sens.

C’est ça qui va nous conduire vers une redynamisation de l’association. Donc trois choses : Premièrement innover ; deuxièmement réduire au minimum le nombre de commissions en y nommant des gens qui sont volontaires et qui se savent capables d’animer ces commissions ; et enfin, pour terminer, la question qui fâche, reprendre avec la bonne vieille habitude qu’on a changée : se retrouver chez les membres ne serait-ce que pour traiter des questions associatives.

Je suis prêt à prendre une commission, mais je suis plutôt porté vers le culturel.

Cœur du Congo comprend présentement vingt-trois membres et certains disent qu’on peut s’arrêter là. A votre avis, doit-on continuer à accepter des adhésions ou devons-nous nous arrêter à ce nombre ?

Je pense qu’il faut ouvrir, mais on doit trouver la limite. Il faut ouvrir, mais pas trop. Ouvrir s’impose car il y a des membres de l’association qui ne sont là que comme figurants. Ils ne sont pas vraiment des membres. Ils ont des réunions qu’ils font avec les autres, ils y sont toujours ; mais nous quand nous faisons nos réunions ils ne sont pas là. Donc je pense qu’il faut ouvrir ne serait-ce que pour écarter ces gens qui sont inefficaces et trouver les moyens qui vont faire que l’association soit efficace.

Dans l’association certains pensent que nous devons garder ces membres inexistants et nous contenter de leur cotisation, d’autres par contre pensent qu’il faut les exclure car participer aux activités contribue à la dynamisation de l’association. Qu’en dites-vous?

Il faut écarter ceux qui ne marchent pas avec nous et prendre d’autres personnes.

Cela nous ramène à l’application des textes et visiblement nous avons toujours un problème à ce niveau ?

L’application des textes a toujours été un problème pour nous, parce qu’on a du mal à faire une distinction entre l’amitié et le fonctionnement normal d’une institution. Il y a tellement de fraternité qu’on a du mal à sanctionner ses frères. C’est presque un problème anthologique. En Afrique, on a hérité ce compor-tement. Généralement, on parle difficilement de justice, on ne parle que de pardon. Il n’y a pas de sanction en tant que telle, il faut pardonner, il faut pardonner. Mais la personne que vous pardonnez ne prend pas toujours conscience qu’elle a bénéficié d’une espèce de grâce. Elle recommence avec les mêmes choses et on continue à l’absoudre par le pardon. Ce qui fait qu’on revient toujours au point de départ. Mais si on se dit que tu as volé tu as dix ans d’emprisonnement, ça change tout, ça change tout. Moi la culture du pardon je ne l’affectionne pas, je suis pour la culture de la sanction. Voilà !

Nous sommes arrivés au terme de notre entretien, et, le mot de la fin vous revient.

Merci pour l’entretien et que vive Cœur du Congo, mais que surtout chacun y mette du sien.

Propos recueillis par Rodrigue Roland MAFOUANA et Bertin Blanchard KIMINOU au domicile de monsieur Christian TCHICAYA.

Commission Communication

Cœur du Congo

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A
Bonjour, <br /> sincèrement je suis touché par les difficultés rencontré par le peuple congolais et je trouve parfaitement legitime et davantage le genre d'actions que vous menez ; j'espère davantage de sensibilisation au sujet des souffrances éprouvé par un peuple opprimé.<br /> En France tout le monde à un smartphone ou presque, mais qui est informé de la provenance du coeur même de leur téléphone dernier cri ? Le coltant est le metal le plus precieux au 21ème siècle, et nous pouvons constater qu'avec l'appat du gain certains sont prêt à rendre des hommes ainsi que des enfants esclaves ; le travail de Malcom X n'est qu'un commencement pour la lutte contre l'esclavagisme.<br /> J'espère sincèrement des campagnes de sensibilisation et des collectes d'argent pour le peuple congolais qui mérite bien plus que ce centime qu'on lui tend pour avoir deterré bien plus qu'un joyau ; le coltant est un metal utile pour toute l'humanité, soyons reconnaissant !
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